47. LE PROPHÈTE

Il affiche un air ravi devant ma surprise.

— Comment disait-on sur Terre 1, déjà ? Ah oui, « le monde est petit ».

— Je croyais que tu étais…

— Mort ? Ailleurs ? C’est vrai VOUS m’avez condamné. Vous m’avez expédié aux égouts sur Terre 18. Chez les rats.

Je me reprends.

— Le peuple des hommes-rats a connu sa période de gloire, il a atteint son apogée puis il a périclité comme toutes les civilisations. Comme tous les organismes vivants. Ils naissent, ils grandissent, ils meurent.

Il joint les mains.

— En fait, l’empire des rats, tout comme jadis l’empire babylonien sur Terre 1, était exsangue quand j’ai « atterri » dans son ancienne capitale occupée. Alors j’ai voyagé. J’ai suivi d’en bas l’histoire que VOUS vous amusiez à écrire d’en haut.

Il croise et décroise ses doigts manucurés.

— À chaque coup de foudre, à chaque rêve, à chaque tremblement de Terre, je me demandais « pourquoi font-ils ça » ? Chaque jour je regardais les actualités, et je savais que ce n’était que vous, les dieux, qui jouiez à manipuler les mortels pour vous affronter.

Il me dévisage avec un regard lourd, chargé de reproches. Il allume un cigare et m’en propose un, offre que je décline.

— J’ai fait la Guerre mondiale de Terre 18.

Il a un ricanement instinctif.

— Comme il est étrange d’être immortel dans un monde où tout le monde périt en masse autour de vous. Seul, debout dans les charniers, je restais perplexe. Si tu savais… J’ai vu tant de gens crever. Et j’aurais dû mourir tant de fois. Pourtant tout explosait autour de moi, les épidémies, les famines se répandaient et chaque fois je survivais. Seul au milieu des êtres chers décédés. C’était là ma punition. Comme Sisyphe avec son rocher qui n’en finit pas de chuter ou Prométhée avec son foie qui repousse sans cesse. J’ai prié pour mourir. J’ai prié un hypothétique « autre dieu parallèle » de mettre fin à vos activités de jeu de l’Olympe. Quel malheur de dépendre de dieux maladroits.

— Disons plutôt de « dieux en formation ». Il faut bien que les élèves s’entraînent. Avant de devenir chirurgiens, nous nous exercions à enlever l’appendice sur des malades qui n’en avaient pas besoin. Pour nous entraîner. Mais c’est grâce à cela que nous avons pu ensuite réussir des opérations délicates.

Il ne prête pas attention à ma remarque.

— Et comme tu le vois je suis encore ici et je suis encore vivant. Et tout ça à cause de toi… Michael, dieu des dauphins, peuple qui a survécu malgré toutes ses persécutions…

Cette fois je perçois dans son intonation une véritable animosité.

— Je n’ai pas voulu que tu sois condamné, affirmai-je.

— Tu as été le principal témoin à charge. Ton soi-disant tir d’ankh sur mon épaule a été l’argument qui a convaincu mes juges.

— Je t’affirme que j’ai essayé jusqu’au bout de rappeler qu’il y avait un doute. Ce n’était pas la bonne épaule.

Il ne répond pas. Je sens bien que de son côté mon procès est bouclé depuis longtemps. Je contemple Joseph Proudhon[1], ancien dieu des rats, le grand théoricien de l’anarchie, le précurseur des mouvements sociaux du XIXe siècle de Terre 1. Il a toujours son regard brillant, ses petites lunettes, sa grosse barbe, ses cheveux longs.

— Je ne t’en veux plus, Michael. Au début, quand j’ai débarqué ici, c’est vrai, c’est contre toi que j’éprouvais le plus de rancune. D’ailleurs ici même j’ai participé, à mon humble échelon, à la destruction des tiens… à ma manière.

— Je ne vois pas ce que tu veux dire.

Il respire amplement sa fumée grise, et lâche, avec un sourire de satisfaction :

— J’ai inspiré ici, directement sur place, un mortel. Un ami. C’était pratiquement un clochard. Je l’ai nourri, je l’ai réconforté, lui ai parlé. Je lui ai dit qu’un seul homme pouvait changer le cours de l’histoire. Je lui ai dicté des idées. Je l’ai poussé à aller jusqu’au bout. Au début il était un peu timide, prêt à accepter des compromis. Il avait peur qu’il y ait des résistances. Il n’avait pas pris conscience qu’on pouvait aller aussi loin sans que personne ne réagisse. Je lui ai expliqué le principe de l’aveuglement collectif.

— L’aveuglement collectif ?

— Oui. Il faut y aller franchement et à fond. Plus le mensonge est énorme, plus il fascine et plus les gens y croient. De même, quand les phares de la voiture surgissent, le lapin reste tétanisé et se laisse écraser.

Je tressaille.

— Le Purificateur !

— En effet. C’est aussi comme cela qu’on a appelé mon ami. Au début, j’ai fait fortune dans la presse. Les gens aiment les petits mensonges, je leur en ai vendu des gros au même prix. À l’époque j’étais en Terre des requins. Il existait déjà une forte propension à la colère. Les mortels se croient toujours victimes d’injustices et cherchent les coupables. De préférence les faibles. Je pense que là-haut le dieu des requins, Xavier je crois, faisait son possible pour créer une armée invasive. Moi, d’en bas, directement sur la scène des événements, j’ai apporté mon soutien en ajoutant le prétexte : « Focaliser la haine séculaire. Détruire les dauphins. » C’est moi qui ai créé ici le mouvement Anti-Dauphin.

Je lui saute dessus, mais il a le temps d’appuyer sur un bouton sous son bureau. Je le bouscule, nous roulons à terre.

Des gardes surgissent et me maîtrisent facilement. Il leur fait signe de me lâcher.

— Laissez-le !

Ses gardes ne comprennent pas.

— Monsieur est un « ami de vacances ». Nous occupions des villas voisines au bord de la plage dans un club sur une île. Et il m’en veut encore pour une partie de… jeu d’échecs qui a mal tourné. Monsieur est un peu rancunier. Tout ça parce que je lui ai mangé quelques pions. Combien déjà ? Ah oui, quelques millions quand même. C’est la force d’inertie. Une fois qu’on est lancé, on n’ose plus freiner.

Je me débats.

— Tu paieras pour cela ! fulminé-je.

— Bien sûr. Toujours cette croyance ancienne qu’on est récompensé pour ses bonnes actions et puni pour ses mauvaises. Mais comme ici nous sommes au pire lieu de châtiment possible, que peut-il m’arriver de plus ?

Joseph Proudhon ordonne à ses sbires de nous laisser et, comme pour me signaler qu’il n’arrivera plus rien de désagréable :

— Ah, ces mortels. Ils sont si… dévoués.

— Je te déteste.

— Je sais, je sais, cela produit toujours cet effet au début. Mais que je sache, d’après mes sources personnelles, tu as recommencé plusieurs fois les cinquante dernières années d’histoire. Et tu as constaté que « mon » Purificateur réapparaissait toujours d’une manière ou d’une autre. Ce n’est qu’un cristalliseur de haine, mais la haine existait avant lui.

— Je te méprise.

— Tu oublies aussi une chose, ce n’est pas moi qui l’ai inventé. Souviens-toi de l’autre Anti-Dauphin historique de Terre 1. Hitler. C’est lui qui a existé avant même que nous n’entamions la partie de jeu d’Y sur Terre 18.

— Tu as créé un Hitler similaire pour Terre 18 !

— J’étais moi-même rempli de rancœur. Et je dois dire que j’ai rêvé que la haine devienne la nouvelle loi du monde. Pourquoi pas après tout ? C’est si facile de pousser les mortels vers leur mauvais penchant naturel.

Joseph Proudhon rallume son cigare et souffle des ronds opaques.

— Tu sais, Michael, j’étais seul à comprendre que l’histoire s’arrêtait puis recommençait sans cesse. À chaque recommencement, je tirais expérience de l’erreur précédente et j’améliorais ma trajectoire individuelle. Comme un tir d’artillerie qu’on affine en observant où tombe l’obus précédent.

— Jusqu’à monter cet empire financier ?

— Au début, en arrivant sur Terre 18, j’avais lancé une entreprise de voyance. Tu t’imagines ? Le mage « Proudhon ». Divination en tout genre. Grâce à ma connaissance des coulisses d’Aeden je ne me trompais jamais. Ça m’a rapporté un petit pécule. Pas assez. Je suis devenu politicien. C’était encore mieux. Puis journaliste. J’ai réfléchi ensuite à ce qui coûtait le moins cher en investissement et qui pouvait rapporter le plus, et j’ai monté une… religion. En fait j’en ai créé plusieurs. Comme un musicien, il fallait que je trouve mon « style ». Finalement il me semble avoir trouvé le meilleur compromis.

— Lequel ?

— Moitié journaliste, moitié religieux.

— Pour un anarchiste c’est un comble.

— Certes, j’ai été anarchiste sur Terre 1, j’ai été élève dieu prônant l’anarchie sur Aeden, mais ici sur Terre 18 je n’ai plus rien à gagner ni à perdre.

— Pourquoi m’as-tu fait venir, Proudhon ?

— Appelle-moi Joseph. Je t’appelle bien Michael. Pourquoi je t’ai fait venir ? Parce que depuis le temps que je garde tous ces secrets j’ai besoin de les partager. J’ai tellement rêvé d’avoir enfin quelqu’un qui puisse me comprendre et partager ma douleur. Je me sens si seul ici sur cette petite planète minable. J’ai besoin d’un peu de compassion. Comme tout le monde.

— Je croyais que tu m’en voulais de ta condamnation…

— Entre le plaisir de te détruire et les avantages que je peux tirer de notre alliance je choisis sans hésiter la deuxième voie. Tu te souviens d’un passage de l’Encyclopédie : « Coopération, Réciprocité, Pardon ». Je te pardonne. Je te préviens en revanche que si tu agis contre moi j’agirai contre toi de la même manière. Enfin je te propose la coopération. Tu vois, je suis devenu raisonnable.

— Pourquoi moi ?

— Mais parce que tu es le seul autre immortel sur cette planète !

— Es-tu sûr que je sois immortel ? Ce n’est pas parce que tu l’es que je le suis aussi !

— La meilleure manière de le vérifier est encore de l’expérimenter.

Il sort un gros revolver calibre 9 mm d’un tiroir et me met en joue tranquillement.

— Je compte jusqu’à 5. Si à 5 tu ne m’as pas promis ton aide je te tue, annonce-t-il placidement.

— Pardon, tu veux quoi ?

— 1… 2… 3… 4… 5.

Il appuie sur la détente. Je tends la main devant moi, et à nouveau l’impression que tout se passe au ralenti… La balle sort du revolver dans une gerbe de feu et avance doucement vers moi. Je sais que je n’ai pas le temps de bouger, la balle avance, traverse ma chemise, brûle ma peau, puis déchire les fibres de mes muscles, fait éclater une côte comme si elle était de bois sec et perfore la masse dense et liquide de mon cœur qu’elle fait exploser, continue jusqu’à mes muscles dorsaux, brise une vertèbre, et s’en va finir dans le mur.

Je tombe à la renverse, les bras en croix, les yeux ouverts.

Cette fois c’est fini.

Je vois le plafond, et Joseph Proudhon, dans un coin de mon cadre de vision, qui se penche sur mon cadavre.

— Arghh… Je meurs.

— Tsss… homme de peu de foi.

J’entends qu’il dépose son arme sur son bureau, reprend son cigare, claque une allumette, puis se penche à nouveau sur mon visage pour lâcher quelques volutes de fumée grisâtre. Je balbutie :

— Dis à Delphine Kamerer que ma dernière pensée a été pour elle.

Je ferme les yeux et je sens que je me vide de mon sang.

Un long temps passe.

Pas encore mort ?

Je bats des paupières.

Je rouvre un œil, puis l’autre.

Je suis encore vivant !

Je me relève sur un coude.

Je contemple, hébété, le trou dans ma veste et le sang qui coule à flots, je mets ma main pour boucher l’imbouchable.

Proudhon reste vautré dans son fauteuil.

— Tu n’as donc vraiment aucune mémoire ? Tu ne te souviens pas de ma condamnation : « Être immortel et conscient dans un monde de mortels inconscients. » Tu as dû recevoir la même, voilà tout.

Je vois que ma blessure commence à se refermer. Je sens la douleur dans mon dos disparaître. Même ma vertèbre est en train de se reconstituer.

— Je sais ce que tu penses, dit Joseph Proudhon. Moi aussi au début j’ai entrevu les bons côtés de l’immortalité. J’ai plongé dans des volcans, j’ai sauté depuis des avions sans parachute, j’ai joué de l’argent à la roulette russe, durant les guerres j’ai fait le malin en première ligne, parfois même en disant aux autres : « Suivez-moi, il n’y a pas de danger, la preuve c’est que j’y vais. » Ah ! ce qu’on peut être joueur quand on découvre qu’on ne peut plus mourir. Et puis j’ai compris que cela ne changeait pas grand-chose. Nous sommes surtout condamnés à nous… ennuyer.

Il reprend le disque vidéo et le replace dans le lecteur. Apparaît le visage de Delphine, tournant la tête et faisant voler ses cheveux noirs au ralenti.

— Tu l’aimes ? Eh bien, prépare-toi à souffrir car elle va vieillir et toi tu resteras éternellement bloqué sur ton âge actuel.

Je me relève, et me rassois face au bureau. Je commence à comprendre.

— Cela fait partie du supplice. Je peux te dire que j’en ai aimé des femmes. J’ai souffert moi aussi mille tourments lorsque je les ai vues se changer en petites vieilles courbées, tremblantes et édentées. Après j’ai décidé de la seule attitude possible : profiter au lieu de subir. Maintenant, comme tu as vu, je renouvelle en permanence le « stock » pour disposer de « chair fraîche ». Et je ne m’investis plus émotionnellement. Des amantes et pas d’amour. Elles sont mignonnes mes filles de l’accueil, n’est-ce pas ? Tu peux prendre celle que tu veux. Je suis partageur.

Ma plaie est maintenant refermée, ne restent que les taches de sang sur ma chemise et mes doigts pour témoigner de ce qu’il s’est passé.

— Nous sommes des dieux. Mesures-tu enfin ton pouvoir ? Alors, ça te dit qu’on fasse alliance, nous, les deux dieux en exil sur cette planète ?

— Désolé. Ça ne m’intéresse pas.

Il écrase son cigare, mécontent. Je me rassois.

— Ah oui, bien sûr j’oubliais… mademoiselle Delphine. Ton « grand amour terrestre ». Total respect.

J’examine le bureau de Proudhon. Des symboles sont reconnaissables. Des rats sculptés.

— Ils t’appellent le Prophète. Tu as donc réellement créé une religion après avoir répété « ni dieu, ni maître » au Royaume des dieux ?

— D’abord le pouvoir, ensuite on décide. Ceux qui me connaissent me vénèrent. Il faut dire que la nouvelle religion que j’ai créée présente l’avantage de leur apporter des explications sensées et solides là où toutes les autres ne font que suggérer de vagues intuitions. C’est le paradoxe suprême : la meilleure manière de montrer que les religions sont des impasses, c’est précisément de bâtir la mienne. La seule qui sache vraiment ce qu’il y a au-dessus. Tu ne peux pas le nier. Nous, nous savons vraiment ce qu’il y a au-dessus.

— Tu as créé une secte !

— Pas de mot grossier s’il te plaît, Michael. Et puis une secte, c’est quoi, après tout, sinon une religion qui n’a pas encore un nombre suffisant de croyants pour obliger les autres à la reconnaître ? Grâce à la haine contre les dauphins j’ai pu fédérer nombre de mouvements politiques dans beaucoup de pays. Par moments j’ai même pu réconcilier les drapeaux noirs, les drapeaux rouges et les drapeaux verts dans une union anti-dauphins. Tu sais, peu de gens aiment tes dauphins. Le plus drôle, c’est qu’on les déteste pour des raisons contradictoires. Ils sont considérés comme trop riches dans les pays pauvres et comme des révolutionnaires trop partageurs dans les pays riches. En fait tout le monde les jalouse. Il y a même des mouvements anti-dauphins dans des pays sans dauphins !

— Je croyais qu’à l’origine, l’anarchie voulait libérer l’homme !

— Pour le libérer il faut commencer par le contraindre. La « dictature du peuple », tu connais ? Quel joli paradoxe.

— Edmond Wells disait : « La plupart des gens sont naturellement généreux mais les salauds, eux, sont mieux organisés. »

— Sacré Edmond, il avait bien raison. Et au final je crois que les salauds finissent par avoir le dernier mot. Tout simplement parce qu’ils… sont plus déterminés. Il faut être réaliste. Le mensonge intéresse plus que la vérité. La dictature fonctionne mieux que la démocratie. La violence amuse plus que la paix. Ils sont tous à aboyer « liberté, liberté ». Mais ils n’en veulent pas. Et si on la leur donne ils s’empressent de l’offrir au plus brutal. Souviens-toi de la révolution russe sur Terre 1 : au nom de la libération du peuple ils tuent le tsar et le remplacent par un superstar, Staline, qui les affame, les déporte et leur interdit tout droit d’expression.

— C’est un concours de circonstances.

— Détrompe-toi. C’est délibéré. Les peuples veulent des chefs charismatiques. Ça les rassure. La liberté les inquiète.

Je me souviens en effet que Proudhon avec ses hommes-rats avait trouvé comment rassurer sa tribu : en désignant des boucs émissaires et en instaurant la peur du chef pour vaincre la peur de la foudre.

— Crois-en l’avis d’un homme qui voit l’histoire se répéter. Sombre et violent est le chemin qu’aiment les mortels, même s’ils ne veulent pas l’avouer. Ce sont des abrutis. Et il faut parler leur langage. Les haineux sont les plus nombreux et les plus faciles à manipuler. Et ensuite ce sont eux les plus actifs. Plus la cause est destructrice, et plus ils s’impliqueront de tout leur cœur. C’est donc en toute logique sur eux que je bâtirai ma révolution mondiale.

— Une révolution ?

— J’ai monté un parti politique qui progressivement accumule les soutiens et devrait bientôt émerger en plus de la secte. Voilà comment je m’occupe.

Proudhon reprend la télécommande et fait avancer les images, jusqu’à ce qu’on me voie avec l’équipe de Papillon Bleu Productions.

— Toi aussi, ta vie d’écrivain ne te suffit pas, tu commences à t’agiter, n’est-ce pas ? Normal. Être dieu en exil sur Terre, c’est frustrant. Je sais que tu as monté quelque chose de puissant. Un jeu. Le Royaume des dieux. Tu vois, naturellement tu utilises ta connaissance de la Vérité pour prendre un ascendant sur les autres.

— Moi, je propose aux mortels de partager mon expérience. Je ne l’utilise pas pour les écraser. Edmond Wells disait : « Le bon maître n’est pas celui qui transforme les autres en disciples. Le bon maître est celui qui transforme les autres en Maîtres…» On pourrait l’appliquer à nous : « Un bon dieu est celui qui transforme les autres en dieux. »

Il applaudit.

— Pas mal. Très fort.

Il sort un dossier avec des articles de presse.

— Le type dans lequel tu es incarné… il n’est pas vraiment à la mode. Gabriel Askolein.

— Telle est ma bénédiction : la possibilité d’inventer des mondes extraordinaires qui ouvrent de nouvelles perspectives. Telle est ma malédiction : être incompris.

— Tu parles de lui comme si c’était toi.

— Je suis Gabriel Askolein. C’est comme si son corps et son esprit savaient que j’allais venir, il était déjà comme moi avant que j’arrive.

— Tu voulais quoi ? Qu’ils t’acclament et reconnaissent ta différence ?

— J’aime mon métier. J’ai l’impression qu’il a un sens et une utilité. J’ouvre des horizons.

— Rappelle-toi sur Terre 1 déjà : tous les vrais pionniers ont été incompris. Ce ne sont ensuite que leurs copieurs qui ont récolté. Normal, les mortels ont peur de la nouveauté, a fortiori si elle les force à changer. Ton originalité est perçue comme une hérésie. Ils ne veulent pas de nouveaux horizons. Ils veulent que se reproduise ce qu’ils connaissent déjà.

— À la longue mon message finira par passer.

— Jamais ton travail ne sera reconnu ou aidé. En revanche si tu me rejoins, tu profiteras de toute la puissance d’un grand groupe de presse. Ton œuvre sera enfin soutenue, expliquée, commentée. Tu pourras même répondre à tes détracteurs.

Il me tend un verre dans lequel il verse un alcool vert fluorescent.

— Je ne t’ai toujours pas convaincu de me soutenir ? Alors changeons d’arguments.

Il prend la télécommande et revient en arrière jusqu’à l’image de Delphine. Il l’arrête puis manie les boutons jusqu’à obtenir un gros plan sur son visage.

— Cette demoiselle est mortelle il me semble. Ce serait dommage qu’il lui arrive des problèmes… Dans ma secte, il y a des fanatiques anti-dauphins. Il ne faudrait pas les pousser beaucoup pour qu’ils s’intéressent à elle ou à tes amis informaticiens. C’est encore le jeu. Chacun a le droit d’avancer ses pièces. Tu as témoigné contre moi en Aeden. Ce qui a entraîné ma condamnation. J’ai mis au point le Purificateur. Ce qui a entraîné ta chute. Nous nous sommes fait mutuellement des « chicaneries ». Nous pouvons encore nous en faire. Ce serait fatigant pour toi et moi. Mais si tu acceptes de coopérer, nous sommes quittes. Crois-moi, les mortels ne méritent pas que tu souffres pour eux.

Je réfléchis un moment, puis :

— Écoute… finalement tu m’as convaincu, j’ai tort et tu as raison.

J’ai toujours rêvé de dire cette phrase : « Tu as raison et j’ai tort. » Dans les débats chacun lance son argument sans écouter celui de l’autre et, au final, chacun repart avec ses convictions de départ. Pourtant, tous espèrent entendre cette phrase : « Tu m’as convaincu. Tu as raison et j’ai tort. »

— Ah ? dit-il, un peu décontenancé. Vraiment ?

— Je tiens trop à Delphine et à mon peuple. Et puis toi tu as l’expérience de la vie d’élève dieu en exil sur Terre 18. Tu sais donc mieux que moi ce qu’il faut faire. Il serait stupide de ma part de ne pas t’écouter. Et puis, comme tu dis : « Il vaut mieux s’appuyer sur les imbéciles, ils sont plus nombreux. »

Il pose son cigare et me tend à nouveau le verre d’alcool vert fluorescent que j’avais refusé. Je le vide d’un trait et cela me revigore.

— Bon, alors on signe quelque chose ou on se serre la main ?

— Pour moi ta parole me suffit, dit-il.

Je contemple le revolver 9 mm posé sur la table.

— Pour être juste, pour que nous soyons vraiment quittes, il faut que je te fasse ce que tu m’as fait, non ?

Il prend le revolver 9 mm et me le tend.

— Si cela te rassure, tue-moi et nous serons à égalité.

Je pose le canon contre son front.

— Et si je tire dans ta cervelle tu resteras vivant quand même ?

Il grimace un sourire.

— Parfois quand j’ai des migraines trop violentes, je fais ça. J’appelle cela m’« aérer les idées ». C’est mieux que l’aspirine.

Il conserve son sourire narquois et reprend son cigare qu’il fume tranquillement sans se soucier que mon doigt presse la détente.

— Je tire à 5. 1… 2… 3…

La balle creuse un gros trou dans son front, le haut du crâne explose en morceaux blancs comme de la coquille de noix de coco. Il ne reste que le menton et la bouche et plus rien au-dessus. Les lèvres n’ont pas lâché le cigare.

Déjà les os se mettent à repousser à toute vitesse mais il n’y a pas encore d’yeux ni d’oreilles sur sa tête, je profite de ce répit pour ramasser le revolver et bondir par la fenêtre qui donne sur le parc. Si mes estimations sont bonnes il m’a fallu une bonne minute pour retrouver ma conscience après le tir dans le cœur. Je dispose donc de ce temps-là pour filer.

Il y a une voiture de sport sur le parking. La portière est ouverte. Les clefs de contact sont sur le tableau de bord. Je démarre et fonce. Par chance les vitres sont teintées. Je sais que je n’ai que quelques secondes pour sortir du parc.

J’accélère sur les gravillons de l’allée. Quand j’arrive à la grille je m’attends à ce que l’alarme résonne, que les gardes me bloquent et que les chiens soient lâchés, mais il ne se passe rien.

Proudhon n’a pas encore reconstruit les zones du langage de son cerveau.

Je continue à rouler dans la campagne sans être poursuivi. Je n’ai plus une seconde à perdre.

Le Mystere des Dieux
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